De nombreux Canadiens se demandent comment transférer leur chalet à la génération suivante de manière avantageuse sur le plan fiscal. Pour bon nombre de vos clients, le nouveau taux d’inclusion des gains en capital pourrait compliquer davantage la situation. Le présent article porte sur les options de planification de la succession. De nombreuses stratégies peuvent être envisagées, mais certains pièges pourraient s’appliquer à ces transferts.
Pourquoi vendre à un prix inférieur à la juste valeur marchande n’est pas juste
Dans bien des cas, un enfant adulte n’a pas l’argent nécessaire pour acheter le chalet familial de ses parents. Si les parents n’ont pas besoin de cet argent pour financer leur retraite, ils pourraient envisager de vendre le chalet à l’enfant pour une valeur nominale, ou un montant nettement inférieur à la juste valeur marchande (JVM). Cela pose problème sur le plan fiscal, car la vente pourrait entraîner une double imposition.
Voici pourquoi. Les parents sont tenus de payer de l’impôt sur le gain en capital, peu importe le prix auquel ils ont vendu le chalet. Le montant de cet impôt est calculé comme la différence entre le prix de base rajusté (PBR) et la JVM de la propriété. Le PBR de l’enfant est déterminé par le prix d’achat, ce qui peut faire en sorte que l’enfant paiera de l’impôt sur un gain en capital au moment où il vendra la propriété, impôt que les parents ont déjà payé.
Supposons que Michel vend le chalet familial à sa fille, Jennifer, pour 1 $, alors que le chalet a une JVM de 1 M$ et un PBR de 500 000 $. Quel que soit le prix d’achat, le gain en capital de Michel est le même : 500 000 $. Son impôt à payer serait donc de 156 133 $ (voir le tableau 1).
Tableau 1 : Impôt à payer par le parent sur la vente du chalet
Calcul des gains en capital |
Valeurs pour Michel |
JVM |
1 000 000 $ |
PBR |
500 000 $ |
Gain en capital |
500 000 $ |
Gain en capital imposable (250 000 $ à 50 % + 250 000 $ à 66,67 %) |
291 675 $ |
Impôt sur les gains en capital payable (53,53 %)* |
156 133 $ |
* Suppose le taux d’imposition le plus élevé des particuliers pour l’Ontario et que Michel ne peut pas utiliser l’exemption pour résidence principale.
La vente de la propriété à Jennifer pour 1 $ fait en sorte que son PBR est de 1 $, plutôt que la JVM de la propriété. Si elle vend plus tard la propriété pour 2 M$, elle réaliserait un gain en capital substantiel, soit près de 2 M$ (voir le tableau 2).
Tableau 2 : Impôt à payer par l’enfant sur la vente du chalet
Calcul des gains en capital |
Valeurs pour Jennifer |
JVM |
2 000 000 $ |
PBR |
1 $ |
Gain en capital |
1 999 999 $ |
Gain en capital imposable (250 000 $ à 50 % + 1 749 999 $ à 66,67 %) |
1 291 724 $ |
Impôt sur les gains en capital payable (53,53 %)* |
691 460 $ |
* Suppose le taux d’imposition le plus élevé des particuliers pour l’Ontario et que Jennifer ne peut pas utiliser l’exemption pour résidence principale.
En vendant le chalet à Jennifer pour 1 $, Michel pensait l’aider, mais il lui a plutôt nui. Si elle vendait la propriété pour 2 M$, elle serait assujettie à un gain en capital de 1 999 999 $. De plus, cette situation entraînerait une double imposition sur le gain en capital de 500 000 $ de Michel.
Quelles sont les autres options?
Don du chalet
Michel peut faire don du chalet à Jennifer. Il paiera l’impôt sur les gains en capital sur la différence entre le PBR et la JVM du chalet, comme il l’a fait ci-dessus. L’avantage est que le PBR de Jennifer sera désormais la JVM du chalet. Par conséquent, si elle vend le chalet pour 2 M$, son impôt sur les gains en capital serait considérablement moins élevé que si elle l’avait acheté pour 1 $ (voir le tableau 3).
Tableau 3 : Impôt à payer par l’enfant sur le don reçu
Calcul des gains en capital |
Valeurs pour Jennifer |
JVM |
2 000 000 $ |
PBR |
1 000 000 $ |
Gain en capital |
1 000 000 $ |
Gain en capital imposable (250 000 $ à 50 % + 750 000 $ à 66,67 %) |
625 025 $ |
Impôt sur les gains en capital payable (53,53 %)* |
334 576 $ |
* Suppose le taux d’imposition le plus élevé des particuliers pour l’Ontario et que Jennifer ne peut pas utiliser l’exemption pour résidence principale.
Utilisation de la provision relative aux gains en capital
Le don du chalet est une meilleure option pour Jennifer, mais Michel doit tout de même payer l’impôt sur les gains en capital de 156 133 $, somme considérable à payer en une année. Michel pourrait envisager d’utiliser la provision relative aux gains en capital afin de répartir le gain en capital (et l’impôt à payer) au fil du temps. Tant que Michel ne reçoit pas la totalité du produit de la vente du chalet au cours d’une même année, la Loi de l’impôt sur le revenu lui permet d’étaler le gain en capital sur la vente sur un maximum de cinq ans. De cette façon, Michel peut maintenir le gain en capital annuel sous 250 000 $ (en supposant qu’il ne réalise pas d’autres gains au cours de l’année) et profiter du taux d’inclusion de 50 %.
Pour ce faire, Michel devra vendre le chalet à la JVM et Jennifer devra le payer au moyen d’un billet à ordre (qui pourra être radié plus tard, ce que nous verrons plus loin). Le billet à ordre doit être structuré de façon à ce que Michel ne reçoive pas plus de 20 % du produit de la vente chaque année au cours des cinq prochaines années.
Dans cette situation, Jennifer ne sera pas tenue de trouver l’argent nécessaire pour acheter le chalet (en supposant que le billet à ordre est radié) et, comme aucune somme d’argent ne change de main, Michel peut répartir le gain en capital sur un maximum de cinq ans.
L’Agence du revenu du Canada est d’avis qu’une provision raisonnable peut être établie selon la formule suivante :
Provision = (gain en capital ÷ produit de la disposition) x montant payable après la fin de l’année
Le calcul de la provision pour ce cas est présenté dans le tableau 4.
Tableau 4 : Calcul de la provision
Année d’imposition |
Provision |
2024 |
(500 000 $ ÷ 1 000 000 $) x 800 000 $ = 400 000 $ |
2025 |
(500 000 $ ÷ 1 000 000 $) x 600 000 $ = 300 000 $ |
2026 |
(500 000 $ ÷ 1 000 000 $) x 400 000 $ = 200 000 $ |
2027 |
(500 000 $ ÷ 1 000 000 $) x 200 000 $ = 100 000 $ |
Le tableau 5 donne un exemple de la façon dont la provision relative aux gains en capital fonctionnerait si Michel vendait la propriété à Jennifer en 2024 et était en mesure de profiter de la provision.
Tableau 5 : Utilisation de la provision relative aux gains en capital pour répartir l’impôt à payer sur cinq ans
Année d’imposition |
Solde du gain en capital à déclarer |
Provision |
Provision maximale |
Gain en capital déclaré |
Gain en capital imposable |
Impôt sur le revenu |
2024 |
500 000 $ |
400 000 $ |
80 % |
100 000 $ |
50 000 $ |
26 765 $ |
2025 |
400 000 $ |
300 000 $ |
60 % |
100 000 $ |
50 000 $ |
26 765 $ |
2026 |
300 000 $ |
200 000 $ |
40 % |
100 000 $ |
50 000 $ |
26 765 $ |
2027 |
200 000 $ |
100 000 $ |
20 % |
100 000 $ |
50 000 $ |
26 765 $ |
2028 |
100 000 $ |
– |
– |
100 000 $ |
50 000 $ |
26 765 $ |
500 000 $ |
250 000 $ |
133 825 $ |
Comme le gain en capital annuel est inférieur à 250 000 $, Michel peut profiter d’un taux d’inclusion de 50 % sur le gain en capital annuel au lieu d’avoir à payer 156 133 $ en impôt sur un an, ce qui lui permet de réduire ce montant à 22 308 $.
Il est important de noter que Michel réalisera un cinquième du gain en capital chaque année sur une période de cinq ans, qu’il reçoive ou non l’argent de Jennifer. Dans son testament, Michel peut radier le billet à ordre, ce qui signifie que Jennifer n’est pas tenue de trouver l’argent nécessaire pour acheter le chalet. Si Michel décède avant que le plein montant du gain en capital ait été réalisé, le solde sera imposable dans sa dernière déclaration de revenus.
Jusqu’à présent, nous avons parlé de l’utilisation de la provision relative aux gains en capital pour un chalet, mais elle peut aussi être utilisée pour d’autres biens en immobilisation pour lesquels le produit de la vente est recueilli sur une période maximale de cinq ans.
Étant donné que la saison des chalets approche et que les clients réfléchissent à la façon de transmettre leur chalet à la prochaine génération, le moment est bien choisi pour discuter avec eux de cette stratégie. Consultez un(e) fiscaliste qui vous aidera à la mettre en œuvre.
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